Dans cette optique, et afin de participer à l’effort d’inventaire que constitue le Bilan Mondial, la Plateforme Océan & Climat et ses partenaires, Conservation International, Rare, The Nature Conservancy, UICN, Wetlands International et WWF International, ont analysé la prise en compte des solutions fondées sur la nature marines et côtières dans les stratégies climatiques des Etats, entre 2015 et 2023 (correspondant au premier cycle de révision des CDN). Les conclusions démontrent une intégration croissante de mesures d’atténuation et/ou d’adaptation, telles que la protection des écosystèmes côtiers de carbon bleu, la mise en oeuvre d’aires marines protégées, ou encore une gestion de la pêche plus résiliente aux impacts du changement climatique, ainsi que les co-bénéfices économiques et sociaux qui en découlent. Une tendance qui pourrait être encore renforcée d’ici au prochain cycle de révision, prévu en 2025, si le Bilan Mondial intégrait l’océan dans ses conclusions, favorisant ainsi le développement de directives pour accompagner les Etats.
Les premières conclusions du Bilan Mondial alertent sur l’insuffisance de l’action climatique
Alors que les conclusions politiques du Bilan Mondial doivent être adoptées à la COP 28, le rapport de synthèse du dialogue technique, publié par la Convention Climat en septembre dernier, donne le ton : si l’Accord de Paris a “impulsé une action climatique quasi universelle”, la fenêtre d’opportunité pour limiter le réchauffement global à 1.5°C se referme rapidement.
En matière d’atténuation, et s’appuyant sur les conclusions du Sixième Rapport d’Évaluation (AR6) du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), l’évaluation technique rappelle la nécessité de réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre de 43 % d’ici 2030 et de 60 % d’ici 2035, par rapport aux niveaux de 2019, afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Pour ce faire, le rapport du dialogue indique qu’une transformation systémique “dans tous les secteurs et dans tous les contextes est nécessaire”. À cet égard, le développement des énergies renouvelables et l’élimination progressive de “tous les combustibles fossiles sans dispositif d’atténuation” sont identifiés comme indispensables pour soutenir cette transformation.
Les efforts sont également jugés insuffisants en matière d’adaptation, y compris pour les pertes et préjudices. En effet, malgré une ambition croissante en termes de plans d’actions et d’engagements, “la plupart des mesures d’adaptation examinées sont fragmentées, progressives, sectorielles et inégalement réparties entre les régions”. Le rapport apporte également des éléments sur les tendances globales en matière d’adaptation à l’élévation du niveau de la mer. Ce dernier mentionne l’apport de moyens de subsistance alternatifs pour les populations côtières et l’amélioration de la gestion des inondations comme des exemples de bonnes pratiques. Il mentionne également l’adaptation fondée sur les écosystèmes, les solutions fondées sur la nature et les systèmes d’alerte précoce comme des approches pouvant répondre à divers risques, et à différents secteurs. Enfin, il mentionne l’importance de la coordination de ces actions aux échelles locales, nationales, régionales et internationales pour favoriser leur efficacité.
Des éléments qui convergent avec les recommandations du plaidoyer Sea’ties de la Plateforme Océan & Climat pour adapter les villes côtières à l’élévation du niveau de la mer. Soutenu par 80 organisations à travers le monde, ce plaidoyer identifie 4 axes prioritaires d’action : la mise en œuvre de solutions de long terme adaptées aux contextes locaux, la prise en compte de la justice sociale, le développement de nouvelles connaissances, et la construction d’un modèle financier solidaire et adapté aux villes côtières. Dans le cadre de la CCNUCC, il appelle notamment à ce que l’adaptation à l’élévation du niveau de la mer soit pleinement considérée dans les cadres du Fonds pour les pertes et préjudices, de l’Objectif mondial sur l’adaptation et du Bilan Mondial.
Pilier de la régulation du climat, l’océan pourtant absent des premiers messages clés émergents du Bilan Mondial
Malgré des signaux positifs quant à une meilleure prise en compte des solutions issues de l’océan, illustrée tant bien dans les stratégies climatiques des Etats que par la mobilisation croissante des acteurs non-étatiques, l’océan était à la marge des discussions tenues lors du dialogue technique du Bilan Mondial, et absent des messages clefs qui en ont émergé. Cette lacune pourrait avoir des répercussions sur le résultat politique du Bilan Mondial, qui prendra la forme d’une décision de la 5e Conférence des Parties agissant comme réunion des Parties à l’Accord de Paris (CMA 5). Afin d’y pallier, la POC, en collaboration avec Ocean Conservancy et 9 partenaires, a publié une série d’options à destination des Etats pour intégrer l’océan dans la décision du Bilan Mondial, proposant notamment des éléments de langage pour chaque section de la décision en cours de négociation.
Les Ocean Breakthroughs, un plan d’action concerté et ambitieux pour répondre aux conclusions du Bilan Mondial
Au-delà des conclusions du Bilan Mondial, la réponse politique qui en émanera devra faire impérativement faire preuve d’ambition. Afin de soutenir et d’accompagner l’action, la communauté océan, unie sous le Partenariat de Marrakech pour l’Action Climatique Mondiale, avec le soutien des Champions de Haut Niveau pour le Climat de l’ONU, a lancé les Ocean Breakthroughs.
Avec pour ambition d’accélérer les efforts et les investissements en faveur de l’action océan-climat, ils couvrent cinq secteurs clés, allant de la conservation marine au transport maritime, en passant par le tourisme côtier, les énergies marines renouvelables et l’alimentation aquatique. Pour chaque secteur, ont été élaborés des objectifs quantifiables, fondés sur la science, à atteindre d’ici 2030 pour assurer un océan sain et productif en 2050.