Après les passages destructeurs des cyclones tropicaux Harvey, Irma, José et Maria en 2017, la question de l’origine de ces évènements extrêmes se pose de façon pressante. Quel est le lien entre cyclones, océan et changements climatiques ?
Les cyclones tropicaux, appelés ouragans dans l’Atlantique nord[1], sont de violentes perturbations, ou dépressions atmosphériques. Au centre du cyclone, que l’on nomme « l’œil », se trouve une zone d’accalmie de 30 à 60km de diamètre en moyenne. A sa périphérie directe, se situe une zone où sévissent plusieurs phénomènes destructeurs : des vents forts pouvant souffler jusqu’à 300km/h ; une hausse du niveau de la mer, ainsi qu’une forte houle qui s’ajoutant à des pluies intenses, causent de graves inondations.
Comment se forment les cyclones ?
Plusieurs facteurs sont nécessaires à la formation d’un cyclone, tels que la présence de vents en altitude (jusqu’à 15 km) relativement homogènes, une forte humidité et des eaux de surface océaniques ayant une température supérieure à 26 °C dans les 60 premiers mètres. Cette température est nécessaire pour réchauffer l’air et permettre une évaporation intense d’eau océanique vers l’atmosphère.
Dans le cas d’Irma, des eaux de surface plus chaudes que la moyenne saisonnière de 0.5 à 2°C et donc dépassant 28°C dans une grande partie de l’Atlantique tropical nord ont causé une évaporation particulièrement importante. La situation pour les cyclones José et Maria était sensiblement la même. La chaleur reçue à la surface de la mer est transformée[2] en altitude en énergie mécanique. Quand cette source d’énergie n’est plus disponible, le cyclone se dissipe. C’est ainsi que les cyclones s’affaiblissent rapidement en pénétrant à l’intérieur des terres, où ils ne sont plus alimentés en eau chaude et donc en humidité et énergie.
Quel lien peut-on faire avec les changements climatiques ?
Concernant le lien entre Irma et le réchauffement climatique, la communauté scientifique reste prudente. Il semble apparaître que des eaux plus chaudes entraînent des cyclones plus longs et intenses[3].
Il reste que cette relation de causalité est établie en se basant sur un nombre élevé de cyclones : en moyenne, les catastrophes climatiques extrêmes seraient plus fréquentes et plus intenses à mesure que la température planétaire augmente, d’après le dernier rapport du GIEC[4]. Harvey, Irma, Jose et Maria constituent des événements sur une année, donc un moment particulier et trop récent pour être désigné comme une conséquence directe et univoque du réchauffement climatique.
On notera par exemple que la saison 2016[5] a été caractérisée par des températures globalement plus chaudes que 2017 dans l’Atlantique tropical. Malgré cette situation a priori plus favorable à l’intensification des cyclones, seuls deux cyclones de catégorie 4 et 5 se sont développés, contre 4 jusqu’ici pour la saison 2017.
Il faudra donc plus de temps et une analyse fine des données de cette année pour établir si tel est le cas et dans quelle mesure.
Ces évènements attirent néanmoins notre attention sur la question du lien entre cyclones et changements climatiques. Il faut replacer Irma, Harvey, José et Maria dans ce contexte et retenir l’hypothèse du réchauffement planétaire comme facteur probable, tout en considérant ces catastrophes comme des illustrations de ce que le futur peut réserver.
Victor Brun, Xavier Capet, Françoise Gaill, Sabrina Speich et Gilles Reverdin
[1] Cyclone est un terme générique. On parle d’ouragans dans l’Atlantique nord, dans le Golfe du Mexique et dans l’est du Pacifique nord ; on parle de typhons dans l’ouest du Pacifique nord et la mer de Chine méridionale.
[2] Essentiellement par le processus d’évaporation de l’eau. Il s’agit de chaleur latente.
[3] Kerry Emmanuel, « Increasing destructiveness of tropical cyclones over the past 30 years », Nature 2005.
[4] IPCC, 2014: Climate Change 2014: Synthesis Report. Contribution of Working Groups I, II and III to the Fifth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change [Core Writing Team, R.K. Pachauri and L.A. Meyer (eds.)]. IPCC, Geneva, Switzerland, 151 pp.
[5] http://www.aoml.noaa.gov/phod/regsatprod/awp/index.php