Pendant longtemps, les discussions sur le changement climatique n’ont pas pris l’océan en compte. Les textes que vous allez lire montrent que les choses changent et que cet environnement planétaire trouve enfin sa place légitime dans les enjeux climatiques. 

Quel rôle l’océan joue-t-il dans le climat et quels sont les impacts du changement climatique sur l’océan sont les questions abordées ici en une trentaine de fiches scientifiques à télécharger. 

Par Sabrina Speich, Gilles Reverdin, Herlé Mercier et Catherine Jeandel

Le climat de notre planète est régi en grande partie par l’océan qui est le principal régulateur du climat mondial grâce à ses échanges radiatifs, mécaniques et gazeux continuels avec l’atmosphère. En particulier, l’océan absorbe, stocke et transporte dans son mouvement la chaleur du soleil en affectant la température et la circulation de l’atmosphère. En outre, l’Océan est la source principale des précipitations. La capacité de l’océan à stocker la chaleur est bien plus efficace (absorption de 93% de l’excédent d’énergie résultant de l’augmentation de la concentration atmosphérique des gaz à effet de serre due aux activités humaines) que les continents (3%) et l’atmosphère (1%). Il a ainsi un effet modérateur sur le climat et ses changements. Tou-tefois, comme conséquence de l’absorption par l’Océan de l’excès de chaleur induit par l’augmentation du contenu atmosphérique des gaz à effet de serre, les eaux marines se réchauffent, ce qui a des conséquences sur les propriétés et la dynamique de l’océan, sur ses échanges avec l’atmosphère et sur les habitats des éco-systèmes marins. Pendant longtemps, les discussions sur le changement climatique n’ont pas pris les océans en compte. Ceci tout simplement parce que très peu était connu à leur sujet. Cependant, notre capacité à comprendre et d’anticiper l’évolution du climat terrestre, dépend de notre connaissance fine des océans et de leur rôle sur le climat.

Par Laurent Bopp*, Chris Bowler*, Lionel Guidi, Éric Karsenti et Colomban de Vargas* et al. *auteurs principaux

L’océan contient 50 fois plus de carbone que l’atmosphère et il échange chaque année des quantités impor-tantes de carbone avec cette dernière. Au cours des dernières décennies, l’océan a ralenti le rythme du chan-gement climatique anthropique en absorbant près de 30% des émissions anthropiques de dioxyde de carbone. Alors que cette absorption de carbone anthropique est le résultat de processus physico-chimiques, la biologie marine joue un rôle clé dans le cycle du carbone naturel en séquestrant de grandes quantités de carbone dans les eaux de l’océan profond. Des modifications de ces processus physiques, chimiques ou biologiques, pourraient conduire à des rétroactions dans le système climatique et ainsi accélérer ou ralentir le changement climatique en cours. Ces rétroactions entre le climat, l’océan et ses écosystèmes ont besoin d’être mieux com-prises afin de pouvoir prédire de façon plus solide l’évolution des caractéristiques de l’océan du futur, et l’évo-lution combinée du CO2 atmosphérique et de notre climat.

Par Benoit Meyssignac et Gilles Reverdin

Les mesures des marégraphes, puis des satellites ont démontré que la mer est montée globalement à une vitesse moyenne de l’ordre de 1,7mm par an depuis le début du XXe siècle, une conséquence directe du réchauf-fement climatique d’origine anthropique, bien que l’on constate une forte variabilité régionale. Cette hausse est principalement liée à deux phénomènes: l’augmentation de la température des océans d’où une dilatation de l’eau de mer et la fonte des glaces continentales, glaciers et calottes polaires avec un apport d’eau douce à l’océan. Dans le futur, malgré les incertitudes, les scénarios indiquent une poursuite de la montée du niveau de la mer à un rythme plus rapide qu’au xxe siècle pour atteindre entre plus 25cm (cas le plus favorable) et plus 82cm (cas le mois favorable) en 2100.

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Par Valérie Chavagnac et Catherine Jeandel

A toute époque géologique, l’état chimique de l’océan détermine sa capacité à absorber du gaz carbonique, donc à participer à la régulation du climat. Cet état dépend du bilan entre les apports et départs d’éléments chimiques à l’océan, deux termes particulièrement complexes à quantifier. Cet article dresse l’état de nos connaissances sur les apports dissous et solide entre océan et continent d’une part et océan et croûte océanique (soit les flux hydrothermaux) d’autre part.

Par Jean-Pierre Gattuso et Lina Hansson

Chaque jour, les océans absorbent un quart du CO2 produit par l’homme, d’où une modification chimique de l’eau de mer qui se traduit par une acidification des océans. La dissolution du CO2 dans l’eau de mer entraîne une diminution du pH (plus le pH est faible, plus l’acidité est importante) et de la quantité d’ions carbonates (CO32–) qui sont l’une des briques nécessaires aux plantes et animaux marins pour fabriquer leurs squelettes, coquilles et autres structures calcaires. L’acidité des océans a augmenté de 30% en 250 ans et ce phénomène continue à s’amplifier. Ses effets et son interaction avec d’autres modifications environnementales restent mal connus. L’acidification menace directement des espèces comme les huîtres et les moules consommées par l’homme et aura aussi un impact sur les chaînes alimentaires marines.

Par Kirsten Isensee, Lisa Levin, Denise Breitburg, Marilaure Gregoire, Véronique Garçon et Luis Valdés
 

La diminution du contenu en oxygène (désoxygénation) des eaux marines et côtières s’est aggravée ces der-nières décennies dans différentes régions de l’océan mondial. Les causes principales sont d’une part le chan-gement climatique (les eaux plus chaudes contiennent moins d’oxygène et l’augmentation de la stratification en surface réduit la ventilation et donc l’oxygénation de l’intérieur des océans et des estuaires) et d’autre part l’eutrophisation (enrichissement des eaux en nutriments) des zones côtières, due à l’intensification des activités humaines. La désoxygénation de l’océan ouvert, le réchauffement et l’acidification – tous liés à l’augmentation de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère – constituent ainsi des stress multiples sur l’écosystème océa-nique et une menace globale dont les conséquences socio-économiques commencent juste à être reconnues.

 

Par Nadine Le Bris

L’océan profond (de 200m jusqu’à 11000m), représente plus de 98% des eaux marines en volume. L’image d’un environnement stable et homogène sur de vastes espaces, biologiquement peu actif, ne reflète en fait ni la diversité des écosystèmes profonds ni leur sensibilité aux changements climatiques. Même sur les plaines abyssales, des variations d’abondance de certaines espèces ont été attribuées aux modifications de la pro-ductivité photosynthétique à la surface de l’océan. De plus, de nombreux «hot spots», points chauds, de biodi-versité et de productivité, ainsi que leurs espèces fondatrices comme les coraux profonds pourraient se révéler particulièrement vulnérables aux changements déjà observables dans les grands fonds, comme le réchauffe-ment local ou régional des eaux profondes, leur acidification et leur désoxygénation ainsi qu’aux modifications de la circulation des masses d’eau. Cette vulnérabilité questionne notre capacité à anticiper les conséquences des changements climatiques sur des écosystèmes mal connus et les services qu’ils assurent.

Par Philippe Koubbi, Gabriel Reygondeau, Claude De Broyer, Andrew Constable et William W.L. Cheung

La partie australe de l’océan mondial est la plus isolée de toute activité industrielle ou anthropique. Pourtant, depuis plusieurs décennies, de nombreux observateurs rapportent des changements significatifs aussi bien des écosystèmes que des espèces qui y vivent. Ces perturbations ont été dans la majorité des cas attribuées aux conséquences de l’activité humaine qu’elles soient indirectes (augmentation de la température, modification de la saisonnalité de la banquise, conséquences du trou dans la couche d’ozone, acidification des eaux) ou directes (exploitation des ressources vivantes par les pêches). La magnitude de ces pressions varie en fonction des régions de l’océan Austral. Si l’image d’un océan peu diversifié est gravée dans l’esprit collectif, il n’en est rien comme le montre l’Atlas biogéographique de l’océan Austral (De Broyer et al., 2014) où plus de 9064 espèces ont été identifiées. Les perturbations déjà observées sont supposées altérer le fonctionnement de ces écosystèmes et des réseaux trophiques. Cela concerne la modification des habitats des espèces pélagiques et benthiques, des producteurs primaires jusqu’aux prédateurs supérieurs, des organismes côtiers aux espèces des profondeurs, de la zone subantarctique sans glace aux zones couvertes par la banquise. Un exemple connu est la modification du régime de la glace de mer autour de la péninsule Antarctique. Cependant, l’intensité de ce changement s’observe à des degrés différents autour du continent. Cette banquise est pourtant nécessaire à l’accomplissement du cycle de vie de nombreuses espèces comme le krill antarctique dont la biomasse exceptionnelle est à la base de l’alimentation de nombreux prédateurs comme les oiseaux ou les mammifères marins. Les icebergs ou la dislocation récente d’importantes plateformes glaciaires sont également connus pour avoir un impact majeur sur les communautés benthiques. Enfin, les zones subantarctiques, à la limite nord de l’océan Austral seraient les plus concernées par le réchauffement climatique. Dans ce contexte, il est important d’estimer comment la biodiversité de cet océan, habituée à des conditions extrêmes depuis près de 34 millions d’années, pourra s’adapter à ces nouvelles conditions.

Emmanuelle Quillérou, Mathilde Jacquot, Annie Cudennec et Denis Bailly

L’Arctique est, dans l’esprit collectif, associé aux ours polaires et aux explorateurs. Plusieurs industries opèrent en Arctique, à travers l’Arctique, ou à la périphérie du cercle polaire arctique. La fonte de la banquise induite par le changement climatique ouvre l’accès aux ressources naturelles, aux routes maritimes et aux zones touristiques polaires, offrant ainsi de nouvelles opportunités de développement économique en Arctique. Ces opportunités sont extrêmement attractives avec des gains potentiels très élevés, mais pour des coûts financiers, environne-mentaux et sociaux possiblement élevés dans un environnement qui reste financièrement très risqué. Quelques acteurs ont commencé à sécuriser un accès aux ressources de l’Arctique, semant les graines d’une «ruée vers le froid». Cette «ruée vers le froid» ne s’est pas encore matérialisée, ralentie principalement en raison de coûts économiques élevés et de considérations diplomatiques. Le principal défi pour les décideurs locaux et nationaux est de concilier avec succès les perspectives et intérêts des différents acteurs en Arctique. Un renforcement de la capacité institutionnelle existante au rythme du développement économique pourrait faciliter cette conci-liation. Il y a un fort potentiel de création de richesses et de bien-être avec des bénéfices mutuels. Les choix effectifs des différentes industries et pays de l’Arctique pour le développement économique, la coordination et la coopération dans les prochaines années vont déterminer ce que sera l’Arctique de demain.

Par Gilles Bœuf

L’environnement marin a joué un rôle déterminant dans l’histoire de la vie et l’Océan actuel garde son rôle pri-mordial dans cette évolution, ainsi que dans celle du climat. La diversité spécifique reconnue dans les océans ne dépasse pas 13% de l’ensemble des espèces vivantes actuellement décrites, soit moins de 250000. Cela peut-être dû d’une part à un manque de connaissances, surtout pour les zones profondes et pour les micro-or-ganismes, d’autre part au fait que les écosystèmes marins et le mode de vie dans un milieu continu dispersent plus facilement les espèces et prédisposent moins à l’endémisme. Par contre, les biomasses marines peuvent être considérables. Le dérèglement climatique joue un rôle direct sur les pertes de diversité biologique, et celles-ci contribuent aussi en retour au dérèglement lui-même.

Par Denis Bailly, Rémi Mongruel, Linwood Pendleton et Emmanuelle Quillérou

Les écosystèmes marins et terrestres offrent de nombreux bénéfices à la société. Ils subissent cependant des pressions accrues en raison du changement climatique et de l’augmentation de la population humaine, de ses besoins et de leurs répercussions. Ces pressions accrues rendent dans la plupart des cas les pratiques de gestion et les politiques publiques actuelles inadéquates, celles-ci ne parvenant alors plus à atténuer ou réguler de telles pressions et à maintenir le niveau de bénéfices fournis par les écosystèmes. Des approches intégrées centrées sur les écosystèmes peuvent aider à identifier les synergies et les conflits entre les différents bénéfices fournis par ces écosystèmes. Cette identification se fait en lien avec différents niveaux d’utilisation et de conservation des écosystèmes. L’approche par les services écosystémiques peut aider à structurer la production d’évaluations exhaustives s’appuyant sur des connaissances scientifiques et les expériences des gestionnaires. Un processus itératif de «triage» peut être utilisé pour structurer l’interaction et le dialogue entre les acteurs et les scientifiques afin d’établir des études qui soient faisables, utiles et pertinentes en lien avec les questions, les besoins et les projets des gestionnaires et décideurs publics. L’approche par les services écosystémiques permet d’établir une photographie à un temps donné des écosystèmes et activités humaines liées, et doit être appliquée à intervalles réguliers afin de pouvoir appréhender l’évolution des différents bénéfices fournis par les écosystèmes dans le temps. L’approche par les services écosystémiques peut être combinée avec le cadre DPSIR (forces motrices, pressions, état, impacts, réponses) afin de permettre une identification des facteurs de changement dans les écosystèmes, La combinaison de ces deux approches peut venir enrichir les discussions visant à l’établissement de plans de gestion et de politiques publiques pour la conservation du milieu marin pour des écosystèmes pro-ductifs et en bonne santé, contribuant au bien-être humain.

 

Les récifs coralliens recouvrent une faible surface des océans, entre 0,08 et 0,16%, mais abritent environ un tiers de toutes les espèces marines connues à ce jour. Ce succès écologique est dû à une symbiose entre le corail et des micro-algues intracellulaires communément appelées zooxanthelles. Organismes ingénieurs, ils sont à l’origine des plus vastes bioconstructions de notre planète. Véritables oasis de vie, ils assurent la subsistance directe à plus de 500millions de personnes dans le monde grâce à la pêche, mais leur intérêt pour l’homme va bien au-delà: protection des côtes contre l’érosion, zones de haute valeur touristique… Les services écologiques issus des récifs coralliens sont estimés à environ 27milliards d’euros par an. Leur croissance est dépendante de nombreux facteurs (lumière, température, pH, nutriments, turbidité…). Ils sont donc extrêmement sensibles aux changements actuels de notre environnement: réchauffement des eaux, acidification des océans, qui s’ajoutent aux perturbations locales (pollution, sédimentation, aménagement des côtes, surpêche, trafic maritime…). Ainsi, une élévation de moins d’un degré Celsius au-delà d’une valeur seuil suffit à provoquer le blanchissement, c’est-à-dire la rupture de la symbiose corail – zooxanthelles, de vastes populations coralliennes, pouvant conduire à la disparition du récif. De même l’acidification des océans perturbe la formation du squelette corallien ainsi que de nombreuses autres fonctions biologiques comme la reproduction. On estime actuellement qu’environ 20% des récifs ont définitivement disparu, que 25% sont en grand danger et que 25% supplémentaires seront menacés d’ici à 2050 si aucune action de gestion n’est menée.

Par Philippe Cury

Le changement climatique modifie la productivité des écosystèmes marins et a un impact sur la pêche, alors que la demande de poisson destinée à la consommation humaine augmente, que le poisson est la principale source de protéines animales pour un milliard de personnes et qu’il s’agit de l’une des ressources renouvelables les plus échangées au monde. Les changements des caractéristiques physico-chimiques de l’eau de mer ont un impact sur le métabolisme des individus, sur les cycles de vie des espèces, sur les relations entre les proies et les prédateurs et sur les modifications des habitats. Les répartitions géographiques des poissons (vitesse de déplacement en direction des pôles de 72,0 ± 13,5km par décennie) ainsi que la dynamique des écosystèmes pourraient subir de profondes perturbations dans les décennies à venir, affectant ainsi les pêcheries au niveau mondial et compromettant la sécurité alimentaire dans nombre de pays du sud. Le maintien des écosystèmes marins en bonne santé et productifs est un enjeu crucial.

 

Par Marc Metian

L’aquaculture, une activité en plein essor, fournit aujourd’hui plus de la moitié des poissons et de crustacés sur les marchés mondiaux. Les changements climatiques mettront en péril certaines productions aquacoles mais leur envergure n’est pas quantifiable actuellement vue l’incertitude des modèles globaux. Une adaptation via l’action des acteurs est également potentiellement réalisable. Les impacts directs seront essentiellement liés à l’évolution des conditions de production en milieu marin comme en zones continentales. Le principal impact indirect sera sans doute lié à la dépendance envers une alimentation exogène pour nourrir les organismes élevés. Cepen-dant, les impacts négatifs (eutrophisation des eaux intérieures, acidification des océans…) et positifs (activités aquacoles dans des zones plus froides, meilleure croissance des organismes élevés…) pourraient s’équilibrer. Les impacts seront variables selon les régions et le type de production.

 

Par Virginie Duvat, Alexandre Magnan et Jean-Pierre Gattuso

Les caractéristiques physiques des petites îles (surface émergée limitée, plaines réduites, forte exposition aux aléas météorologiques et marins) et humaines (forte dépendance vis-à-vis des activités de subsistance et des écosystèmes) expliquent leur vulnérabilité aux changements environnementaux. Elles sont devenues des figures emblématiques des processus associés au changement climatique: élévation du niveau de la mer, intensifi-cation des cyclones, réchauffement des eaux océaniques, et acidification de l’océan. De grandes menaces pèsent donc sur les systèmes insulaires, bien que ceux-ci y répondront de manière très diversifiée: réduction de la surface des îles, recul du trait de côte, dégradation des récifs coralliens et des mangroves, etc. Les répercus-sions sur les ressources terrestres (sols, eau, faune et flore) et marines (ressources récifales et halieutiques) auront des impacts majeurs sur les moyens de survie des sociétés insulaires. Celles-ci vont donc devoir relever un défi considérable.

 

Par Adrien Comte, Linwood Pendleton, Emmanuelle Quillérou et Denis Bailly

Depuis les années 1990, le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) utilise des études de vulnérabilité au niveau mondial en vue d’aider à établir des priorités d’investissement et d’action de lutte contre les effets des changements climatiques. Au-delà du GIEC, cette pratique a été largement utilisée pour étudier la vulnérabilité des zones côtières en lien avec divers risques dont les changements climatiques. Ces études au niveau mondial ont été effectuées en lien avec des objectifs très différents, avec des définitions et modèles de vulnérabilité très variés et sont au fil du temps devenues de plus en plus complexes et gourmandes en données, avec un nombre sans cesse croissant d’indicateurs. La diversité des objectifs, conceptualisations et données utilisées a conduit à l’établissement de classements différents et souvent contradictoires de zones prioritaires pour l’action contre les changements climatiques. La complexité de ces études rend difficile l’identi-fication des sources de différences entre ces classements. Il est en particulier difficile d’identifier à quel point ces classements de vulnérabilité sont liés aux changements climatiques par rapport à d’autres facteurs tels que le développement humain et la capacité d’adaptation des populations aux changements de l’environnement. Si les facteurs derrière ces classements globaux se voulant exhaustifs étaient plus faciles à isoler, les décideurs des actions de régulation du climat pourraient utiliser ces études au niveau mondial plutôt comme des études de cadrage et non pas comme sources de priorités d’investissement climatique définies au niveau mondial. Ces études de cadrage au niveau mondial, afin d’informer utilement les actions de régulation du climat, doivent être simplifiées et harmonisées afin de pouvoir isoler de manière spécifique les moteurs des changements. Elles peuvent aider à cibler les endroits où des études plus fines et complètes au niveau local pourraient être me-nées afin d’informer de manière pertinente les actions de régulation climatique. Elles devraient également être complétées par des études au niveau mondial des coûts des actions de régulation climatique basées sur l’intégration de facteurs techniques, sociaux et économiques.

 

Par Guigone Camus

Les mythologies de l’archipel de Kiribati nous apprennent que le monde tire ses origines de l’ouverture d’une roche suivie du mélange d’une matière sèche avec une matière humide, puis de l’effervescence créatrice d’une foule d’ancêtres. La réalité scientifique occidentale nous apprend que, dans moins de 300 ans, ces atolls de Micronésie orientale disparaîtront sous l’effet de la montée des eaux entraînée par le réchauffement climatique. Quant au terrain ethnographique, il nous apprend que la force de cette société océanienne, installée depuis plus de mille ans au coeur du Pacifique, consiste à renvoyer à son intelligence philosophique l’interprétation du réel climatique contemporain. Le changement climatique révèle cette réalité du duel entre, d’un côté, la survie d’un supposé progrès moderne qui continue de mettre en danger la planète et, de l’autre, la survie de modes de vivre et de se penser Homme dans une nature respectée. Ces deux enjeux seront mis sur la table des négociations lors de la prochaine Conférence sur le Climat de Paris. Est-ce si utopique d’attendre des Parties qu’elles décident de sacrifier à la Nature ?

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