Crédit photo: COP28/Christopher Pike
Le 13 décembre, après deux semaines d’intenses négociations réunissant près de 200 pays et plus de 80 000 inscrits, la COP 28 s’est conclue par l’adoption historique du premier Bilan Mondial (Global Stocktake en anglais). En plus d’avoir acté l’opérationnalisation du Fonds sur les Pertes et Préjudices (en faveur duquel les engagements financiers des États-parties s’élèvent à près de 800 millions de dollars), cette COP a aussi été la première à appeler explicitement à une « transition hors des énergies fossiles » dans son texte final. Sous la présidence des Émirats Arabes Unis, Etat membre de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), des préoccupations importantes et légitimes avaient été exprimées quant au risque que les négociations n’aboutissent pas à un résultat suffisamment ambitieux. Bien qu’il s’agisse d’une étape sans précédent vers l’élimination progressive des combustibles fossiles, de nombreux acteurs ont exprimé leur déception face à l’absence d’une déclaration plus explicite considérant le poids du secteur dans la crise climatique actuelle.
Naviguant dans ces eaux complexes, l’océan a su tirer son épingle du jeu avec une reconnaissance sans précédent de sa contribution à la réalisation des objectifs de l’Accord de Paris. Qu’il s’agisse du préambule ou de la section consacrée aux orientations et pistes pour l’avenir, le potentiel d’atténuation et d’adaptation de l’océan a été pleinement reconnu comme faisant partie des solutions pour faire face aux crises du climat et de la biodiversité.
Alors que les gouvernements se sont accordés sur une décision jugée à la fois historique et faible, plongez dans l’analyse des conclusions de la COP 28 de la Plateforme Océan & Climat.
Les conclusions du Bilan Mondial tirent la sonnette d’alarme sur l’insuffisance de l’action climatique
Sans surprise, et faisant référence aux principales conclusions au 6e rapport d’évaluation du GIEC, le texte final du Bilan Mondial (connu sous le nom de décision CMA-5) reflète l’état actuel de l’action climatique. « Les Parties ne sont pas encore collectivement sur la bonne voie pour réaliser l’Accord de Paris et atteindre ses objectifs de long terme » et la fenêtre pour réhausser l’ambition et mettre en œuvre les engagements existants pour y parvenir se rétrécit rapidement. Faisant écho aux préoccupations concernant l’absence de mentions de « responsabilités communes mais différenciées »dans les versions antérieures du texte du Bilan Mondial, la version finale affirme que l’action climatique est menée par les pays, « conformément aux circonstances nationales »».
Les conclusions du Bilan Mondial indiquent également que les projections sur les politiques mises en œuvre depuis 2020 « devraient entraîner des émissions mondiales de gaz à effet de serre plus élevées que celles indiquées dans les contributions déterminées au niveau national » . Ce constat illustre un écart de mise en œuvre entre les engagements des Parties tels que formulés dans leurs stratégies climatiques et le niveau d’action requis pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. Alors que le GIEC signale qu’une réduction de 43 % des émissions mondiales d’ici 2030 est nécessaire pour maintenir le réchauffement sous la barre des 2°C, le Rapport de Synthèse de 2022 sur les Contributions Déterminées au niveau National (CDN) mentionne que si toutes les CDN étaient mises en œuvre, le niveau d’émissions en 2030 ne serait que 5,3% inférieur à celui de 2019. Le message est clair : les Parties devront faire preuve de beaucoup plus d’ambition dans la conception et la mise en œuvre de leurs prochaines stratégies climatiques nationales, attendues dès 2024.
La Nature au cœur des discussions et une reconnaissance inédite de l’océan comme solution à la crise climatique
En l’affichant comme une priorité d’action, la Présidence de la COP28 a permis d’ancrer la Nature dans les négociations, et de renforcer la reconnaissance de son rôle pour l’action climatique. Comme l’a rappelé S.E. Razan Al Mubarak, Championne de Haut Niveau des Nations Unies pour le Climat de la COP 28 : « la Nature n’est pas seulement décorative ou récréative : elle est fondamentale. De la savane aux mangroves, la Nature est un allié inestimable dans la lutte contre le changement climatique et est l’outil le plus efficace et le plus modulable pour s’adapter à ses conséquences ».
Parmi les divers engagements et initiatives liés à la Nature, la COP 28 fut le cadre d’une importante dynamique, jusqu’au plus haut niveau politique, en faveur du Mangrove Breakthrough, soutenu par 49 gouvernements et plus de 50 acteurs non étatiques, ainsi que du lancement d’une feuille de route financière pour l’atteinte de ses objectifs. Une forte mobilisation en faveur de l’alimentation est également à souligner : 152 dirigeants mondiaux ont signé la Déclaration des Émirats Arabes Unis sur l’agriculture et l’alimentation et plus de 200 acteurs non étatiques se sont unis derrière l’appel à l’action pour la transformation des systèmes alimentaires, en faveur des populations, de la nature et du climat. Par ailleurs, 18 pays ont signé la Déclaration commune de la COP28 sur le climat, la Nature et les peuples qui appelle à adresser conjointement le changement climatique, la perte de biodiversité et la dégradation des sols d’une manière cohérente, synergique et holistique, conformément aux meilleures données scientifiques disponibles. De plus, la Coalition des petits États insulaires en développement (SIDS en anglais) pour la Nature a dévoilé sa « feuille de route pour l’action nature-climat » visant à renforcer certaines aires marines protégées pour lutter contre le changement climatique.
En prévision de la COP 30 à Belém, les présidences émiratie et brésilienne ont annoncé un partenariat de deux ans visant à mobiliser de nouvelles ressources et un soutien politique accru en faveur de la Nature, perpétuant ainsi son rôle central dans les COP climat.
En amont de cette mobilisation sans précédent en faveur de la Nature, les attentes de la communauté océan étaient élevées dans le cadre de cette COP et du premier Bilan Mondial. Exprimées au sein du papier Integrating the Ocean into the CMA 5 decision, ces dernières ont, conformément au souhait de la communauté océan, été intégrées dans le texte final du Bilan Mondial, qui fait référence à l’océan, du préambule aux orientations et pistes pour l’avenir (traduites de l’anglais et détaillées ci-dessous) :
- Dans le préambule, les parties notent « l’importance d’assurer l’intégrité de tous les écosystèmes, y compris […] l’océan ».
- Dans la partie sur l’atténuation, l’article 33 souligne « l’importance de la conservation, de la protection et de la restauration de la nature et des écosystèmes pour atteindre l’objectif de température de l’accord de Paris, y compris […] les écosystèmes marins qui agissent comme des puits et des réservoirs de gaz à effet de serre tout en conservant la biodiversité », et l’article 35 « invite les parties à préserver et à restaurer l’océan et les écosystèmes côtiers et à intensifier, le cas échéant, les mesures d’atténuation fondées sur l’océan ».
- Dans la partie consacrée à l’adaptation, l’article 55 « encourage la mise en œuvre de solutions intégrées et multisectorielles, telles que (…) les solutions fondées sur la nature et les approches fondées sur les écosystèmes, et la protection, la conservation et la restauration de la nature et des écosystèmes, y compris (…) les écosystèmes marins et côtiers » et l’article 56 note que « les mesures d’adaptation et de résilience fondées sur l’océan (…) peuvent réduire une série de risques liés au changement climatique et fournir de multiples co-bénéfices » ; tandis que l’article 63d exhorte les Parties à réhausser l’ambition et à renforcer l’action pour « réduire les incidences du changement climatique sur les écosystèmes et la biodiversité et accélérer le recours à l’adaptation basée sur les écosystèmes et aux solutions fondées sur la nature, notamment par la gestion, l’amélioration, la restauration et la conservation des écosystèmes marins et côtiers, ainsi que par la protection de ces écosystèmes. »
- Dans la section consacrée aux orientations et pistes pour l’avenir, l’article 180 accueille positivement « les résultats du Dialogue sur l’océan et le changement climatique de 2023 et son rapport de synthèse informel, et encourage le renforcement de l’action fondée sur l’océan ».
De plus, le texte insiste à plusieurs reprises sur la nécessité de créer des synergies entre l’Accord de Paris et d’autres cadres mondiaux, dont le Cadre Mondial pour la Biodiversité de Kunming-Montréal et les Objectifs du Développement Durable (articles 33, 63 et 163). Il souligne également le rôle important et l’engagement actif des parties prenantes non-étatiques pour soutenir les Etats-Parties, contribuer aux progrès significatifs vers l’Accord de Paris et renforcer l’ambition (article 158), tout en encourageant les Champions de Haut Niveau pour le climat, le Partenariat de Marrakech pour l’Action Climatique Mondiale (MP-GCA) et les autres parties prenantes à inclure les résultats du Bilan Mondial dans leurs travaux respectifs (article 185).
Les membres de la communauté océan se sont fortement mobilisés, notamment avec le lancement des Ocean Breakthroughs en amont de la COP 28, et ont uni leurs forces dans le cadre de l’organisation du Pavillon Océan et à travers l’organisation de centaines d’événements liés à l’océan, dont deux événements phares le samedi 9 décembre : l’un consacré à la Nature comme meilleure alliée pour l’action climatique, et l’autre aux Ocean Breakthroughs. Les acteurs non-étatiques ont aussi fait grand bruit en annonçant plusieurs mesures visant à intensifier l’action climatique basée sur l’océan :
- Finance : Une coalition de fondations philanthropiques, dont Bloomberg Philanthropies, la Fondation David et Lucile Packard et Oceankind, a annoncé la création de l’Ocean Resilience and Climate Alliance (ORCA) par des institutions pionnières dans le domaine du climat et de l’océan, ainsi qu’une promesse initiale de plus de 250 millions de dollars. Cette initiative sera dédiée à accompagner le développement des solutions basées sur l’océan pour lutter contre le changement climatique – en ciblant la protection des zones marines vulnérables, les solutions d’atténuation basées sur l’océan, et la recherche sur les impacts climatiques.
- Transport maritime : Trente leaders du secteur du transport maritime, dont Maersk et Mitsui O.S.K. Lines, se sont engagés à accélérer la décarbonisation du secteur en portant la quantité de carburant zéro émission issu d’hydrogène produit à partir de sources renouvelables à près de 11 millions de tonnes d’ici à 2030. En outre, la veille de la Journée de la consacrée à la Nature, le « Pacte maritime 2030 pour les peuples et la nature (SPPaN) » a été lancé afin de relever les défis interconnectés de la pollution, de la perte de biodiversité et de la crise climatique, ainsi que les potentiels co-bénéfices liés à la décarbonation du transport maritime.
- Conservation marine : La COP 28 a donné un élan considérable aux Mangrove Breakthrough et au Coral Breakthrough via, respectivement, le lancement de la feuille de route financière pour la protection et la restauration des mangroves et l’annonce de la mobilisation de plus de 200 millions de dollars de nouveaux investissements directs par le Fonds mondial pour les récifs coralliens (FMRC) pour soutenir la conservation et la protection des coraux.
- Sustainable Ocean Plans : 40 entreprises, dont Ørsted, Iberostar Group et Thai Union ont signé un appel en faveur des Sustainable Ocean Plans afin de catalyser les marchés, tout en soutenant la réalisation des Ocean Breakthroughs et de l’Agenda Charm el-Cheikh pour l’adaptation.
Un bilan mitigé en matière d’atténuation malgré des progrès réalisés en termes de transition énergétique
Le potentiel d’atténuation de l’océan pour atteindre les objectifs de réduction des émissions a été amplement reconnu dans la conclusion du Bilan Mondial. S’appuyant sur la décision finale de la COP26, les Parties ont souligné « l’importance de la conservation, de la protection et de la restauration de la nature et des écosystèmes pour atteindre l’objectif de température de l’Accord de Paris, y compris […] les écosystèmes marins qui agissent comme des puits et des réservoirs de gaz à effet de serre […]« . Par ailleurs, la décision finale invite « les Parties à […] intensifier, le cas échéant, les mesures d’atténuation fondées sur l’océan », reconnaissant ainsi un large portefeuille de solutions d’atténuation, comme la décarbonation de l’industrie du transport maritime ou le déploiement des énergies marines renouvelables.
La COP28 a aussi été témoin d’une accélération dans le traitement du sujet de la transition énergétique, avec une attention particulière dédiée à la question de la sortie des énergies fossiles. À ce sujet, les conclusions du Bilan Mondial présentent des avancées notables : pour la première fois, un appel explicite à « une transition hors des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques » est présent dans un texte de décision de la CCNUCC. Il s’agit d’une avancée majeure par rapport à la décision de la COP 27 qui ne mentionnait que les subventions aux combustibles fossiles. Un signal politique fort compte tenu de la contribution significative du secteur des combustibles fossiles aux émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES). Cependant, face à l’urgence climatique actuelle, de nombreux États et acteurs non étatiques déplorent que cette COP n’ait pas entériné une décision sur l’abandon progressif des énergies fossiles. Simon Stiell, Secrétaire exécutif de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), apporte toutefois un point de vue plus optimiste : « Nous n’avons pas tourné la page de l’ère des combustibles fossiles, mais c’est le début de la fin ».
Des engagements en faveur de la réduction des émissions de méthane, un gaz qui représente 10 % des émissions de GES liées au secteur de l’énergie, ont également été pris durant la COP28 : plus d’un milliard de dollars de financements pour la lutte contre le méthane ont été mobilisés depuis la COP 27 et de nouveaux États (le Turkménistan, le Kazakhstan, le Kenya, la Roumanie et l’Angola) ont rejoint l’Engagement Mondial sur le Méthane, portant ainsi le nombre total de signataires à 155. Toutefois, malgré ces financements, aucun calendrier précis ni échelle de réduction des émissions de méthane d’ici à 2030 ne figurent dans le Bilan Mondial.
Il est aussi important de noter les progrès supplémentaires réalisés dans le domaine des énergies renouvelables : la décision du Bilan Mondial appelle les Parties à « tripler la capacité en énergies renouvelables au niveau mondial et à doubler le taux moyen annuel mondial d’amélioration de l’efficacité énergétique d’ici à 2030 » (article 28a). Des engagements ont déjà été pris dans ce sens lors de la COP 28, puisque près de 120 États se sont engagés à tripler la capacité mondiale en matière d’énergies renouvelables et à doubler l’efficacité énergétique d’ici 2030, afin de réduire la part des combustibles fossiles dans la production mondiale d’énergie.
En ce qui concerne le charbon, les résultats sont plus nuancés. Malgré un appel à « accélérer les efforts en vue de la sortie progressive du charbon » (article 28b), le texte reste inchangé par rapport à la décision de Glasgow, reflétant ainsi un manque de renouvellement de l’ambition depuis la COP26.
Le manque de détails sur le financement de la transition énergétique, en particulier pour les pays qui en ont le plus besoin, ainsi que l’appel à l’accélération des « technologies d’élimination telles que le captage, l’utilisation et le stockage du dioxyde de carbone » (article 28e) suscitent également des inquiétudes. Comme le rappelle le 6ème rapport d’évaluation du GIEC (AR6), les méthodes de géo-ingénierie se heurtent à de sérieuses limites. Leur efficacité en matière d’absorption du CO2 reste incertaine car elles demeurent encore à un stade de développement précoce et n’ont jamais été déployées à grande échelle. Les connaissances quant à leur impact potentiel en termes d’émissions de gaz à effet de serre et de conséquences pour la biodiversité sont encore très lacunaires. Il est donc impératif d’adopter une approche prudente et éthique, tout en gardant la réduction drastique des GES à l’échelle mondiale comme priorité.
Adaptation : un résultat en-deçà des attentes et des besoins
Le Bilan Mondial souligne le rôle de l’océan et des écosystèmes marins et côtiers dans l’adaptation au changement climatique et à ses impacts, et dans le renforcement de la résilience. Reconnaissant l’importance des solutions intégrées et multisectorielles et les co-bénéfices qu’elles procurent, le Bilan Mondial appelle à l’adoption d’approches fondées sur les écosystèmes et à la mise en œuvre de Solutions Fondées sur la Nature, notamment marines et côtières.
Plus globalement, tout en reconnaissant les efforts mis en œuvre par les Parties pour intensifier leur déploiement, le Bilan Mondial appelle à des « actions d’adaptation urgente, incrémentales, transformationnelles et impulsées par les pays » , conformément aux conclusions des plus récents rapports du GIEC. À cet égard, il reconnaît la nature itérative de l’adaptation, qui nécessite de passer par l’évaluation des risques et des impacts, la planification, la mise en œuvre, ainsi que le suivi, l’évaluation et l’apprentissage.
La finalisation de l’Objectif Mondial d’Adaptation (OMA ou GGA en anglais), complémentaire au Bilan Mondial, était aussi au cœur des négociations de la COP28. Le cadre adopté comprend plusieurs objectifs stipulant que, d’ici à 2030, toutes les parties doivent avoir (a) réalisé et mis à jour l’évaluation des impacts, des risques et des vulnérabilités; (b) mis en place des plans nationaux d’adaptation et intégré l’adaptation dans toutes les stratégies pertinentes; (c) progressé dans leur mise en œuvre et, enfin, (d) conçu et rendu opérationnels des systèmes de suivi, d’évaluation et d’apprentissage. Reportant à 2024 les délibérations des Parties sur un nouvel objectif collectif quantifié en matière de finance climatique, le document final sur l’adaptation annonce le lancement d’un programme de travail de deux ans « sur des indicateurs pour mesurer les progrès accomplis […] en identifiant et, si nécessaire, en élaborant des indicateurs et des éléments quantifiés potentiels pour ces objectifs ».
Le cadre de l’OMA urge également les Parties et les acteurs non étatiques à baser les efforts d’adaptation sur les meilleures données scientifiques disponibles et sur les « visions du monde et les valeurs des peuples autochtones”. Il souligne en outre l’importance d’une gouvernance inclusive et reconnaît un éventail de parties prenantes clés, telles que le secteur privé, à différents niveaux de gouvernance, et les gouvernements locaux. L’OMA reconnaît le rôle de « leader » des peuples autochtones et des communautés locales en tant que « gardiens de la nature« . En conséquence, il met fortement l’accent sur les questions d’équité sociale, notamment en préconisant l’adoption d’une approche « sensible au genre » et « aux droits de l’homme » , ainsi que des considérations d' »équité intergénérationnelle » lors de l’élaboration des mesures d’adaptation.
Ces principes devraient guider les actions visant à atteindre les objectifs de l’OMA et, plus spécifiquement, une série de 7 objectifs – dont un sur « la réduction des impacts climatiques sur les écosystèmes et la biodiversité, et l’accélération de l’utilisation de l’adaptation fondée sur les écosystèmes et des solutions basées sur la nature, y compris par leur gestion, leur amélioration, leur restauration et leur conservation et la protection des […] écosystèmes marins et côtiers » – un langage aligné avec le Cadre mondial pour la Biodiversité de Kunming-Montréal.
Toutefois, le financement de l’adaptation a fait l’objet de nombreuses critiques et préoccupations, tant dans les discussions relatives à l’OMA que celles du Bilan Mondial. Les parties ont exprimé leur appréhension quant à l’élargissement du « déficit de financement de l’adaptation, soulignant que les « besoins de financement de l’adaptation des pays en développement sont estimés à 215-387 milliards de dollars par an jusqu’en 2030 ». Malgré l’engagement pris lors du Pacte de Glasgow par les pays développés de doubler d’ici 2025 le financement de l’adaptation pour les pays en développement par rapport aux niveaux de 2019, de nombreux pays en développement ont mis en évidence l’inadéquation de l’objectif et l’absence de références et d’indicateurs pour le suivi du financement de l’adaptation. Bien que le Bilan Mondial reconnaisse l’objectif fixé, il reconnaît également que « le financement de l’adaptation devra être considérablement augmenté au-delà du doublement » pour soutenir efficacement les besoins urgents et évolutifs d’accélération de l’adaptation et de renforcement de la résilience dans les pays en développement. En réponse aux préoccupations concernant l’endettement croissant des pays en développement pour financer l’adaptation, le texte final souligne l’importance de développer les instruments fondés sur les subventions mais aussi non liés à la dette.
Dans l’ensemble, les décisions de la COP 28 sur l’adaptation, liées à la fois au Bilan Mondial et à l’Objectif Mondial d’Adaptation, sont considérées par de nombreux observateurs comme n’ayant pas permis d’atteindre des cibles concrètes et sont décrites comme un ensemble de termes ambigus – pour lesquels les Parties n’ont pas de compréhension commune, ni de vision et de définition alignées. Comme l’a déclaré Tom Mitchell, Directeur exécutif de l’IIED, « les engagements actuels en matière d’adaptation sont les bienvenus, mais ils sont loin d’être suffisants et alimentent un système défaillant », soulignant de fait les profondes fractures qui existent entre les pays en développement et les pays développés.
Les attentes étaient élevées pour cette COP, et bien que de nombreuses parties prenantes soient mitigées face à ses résultats, des avancées notables ont été réalisées, proposant aux États une feuille de route claire pour ajuster leurs trajectoires climatiques. Avec l’inclusion de l’océan dans les orientations et les pistes à suivre, le résultat du Bilan Mondial souligne le rôle crucial de l’océan dans la réponse mondiale nécessaire pour corriger le cap et atteindre les objectifs de long terme de l’Accord de Paris. À ce titre, les Parties ont accueilli favorablement les conclusions du Dialogue sur l’Océan et le Changement Climatique de 2023, soulignant à la fois son rôle dans l’aide apportée aux Parties à améliorer leurs mesures basées sur l’océan et le besoin de renforcer l’action océan-climat au sein des processus existants de la CCNUCC. En effet, l’adoption du premier Bilan Mondial n’est pas une fin en soi, mais le début d’une plus grande ambition à déployer au niveau national, y compris lors de la prochaine révision des stratégies climatiques des Parties. Par ailleurs, cette COP a redonné un élan à la coopération internationale et ravivé l’espoir d’une élimination progressive des combustibles fossiles. Désormais, comme l’a rappelé Simon Stiel lors de la séance plénière de clôture, « tous les gouvernements et toutes les entreprises devront traduire ces engagements en actions tangibles dans l’économie réelle ». Avec les Ocean Breakthroughs, la communauté océan dispose, dès à présent, d’un phare pour guider et accélérer les actions et les investissements dans les secteurs liés à l’océan afin d’atteindre les objectifs climatiques et relatifs à la biodiversité, à l’approche des prochaines COP qui se tiendront en Azerbaïdjan en 2024 et au Brésil en 2025.