Le 3 décembre, le Président de la République a présenté son ambition maritime pour la France lors de l’édition 2019 des Assises de l’économie de la mer, à Montpellier. Il s’agira de développer le secteur maritime tout en gardant à l’esprit la nécessaire préservation de l’océan. Dans ce contexte, le Comité interministériel de la mer (CIMER), outil gouvernemental de décision pour ce qui a trait à la mer et à l’océan, publie son dossier de presse qui dresse un bilan des années 2017 et 2018 et fait état des mesures prises en 2019. Le CIMER réunit tous les acteurs maritimes français (filières économiques, ONG, collectivités) afin d’élaborer la stratégie maritime nationale. Comme le souligne le Premier Ministre Edouard Philippe dans son éditorial introductif, le CIMER s’inscrit cette année dans la lignée des préoccupations climatiques croissantes et de la sortie du Rapport Spécial du GIEC sur l’océan et la cryosphère dans le contexte du changement climatique. 

Le CIMER profite donc de l’annonce de ses mesures prises en 2019 pour faire un état des lieux des années 2017 et 2018 et décompose ce bilan en quatre axes : l’accélération de la transition écologique du transport maritime, le développement de l’économie bleu, l’usage sûr de la mer et la compréhension accrue de la mer. Les enjeux climatiques et environnementaux y figurent donc en bonne place.

En effet, la France a entrepris de consulter divers acteurs au sujet de la protection de l’environnement marin. C’est le rôle du Comité France Océan (CFO), instance de concertation de la protection de l’environnement marin, qui réunit plus de 50 représentants d’ONG, d’établissements et de services publics. Ce comité, présidé par la Ministre de la Transition Ecologique et Solidaire et dirigé par le SGMer, est organisé en quatre groupes de travaux thématiques : lutte contre la prolifération des déchets marins, préservation de la biodiversité marine, lutte contre l’artificialisation du littoral, levée des freins à la protection de l’environnement marin. La Plateforme Océan et Climat œuvre activement au sein de ces groupes et co-préside notamment le quatrième groupe traitant des freins. La France soutient également à l’Organisation maritime internationale la création d’une zone de faibles émissions en mer Méditerranée, souvent appelée « zone ECA ». La réduction de la vitesse des navires contribue à réduire la pollution liée au shipping. Cette question de la protection de l’environnement ne concerne d’ailleurs pas uniquement les politiques ou acteurs économiques du fret, mais aussi les loisirs et notamment la filière du recyclage des navires de plaisance. Aussi, une filière de responsabilité élargie a été lancée afin de gérer leur déconstruction. Elle s’appuie sur un mécanisme de financement reposant en partie sur une « écocontribution perçue sur les ventes de navires neufs et par l’affectation d’une part du droit annuel de francisation des navires. »

Enfin, dans les mesures consacrées au développement de l’économie bleue, l’ambition de développer les énergies marines renouvelables dans une logique d’atténuation est notable. L’objectif est de porter à 33% la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique. Ainsi, quatre fermes pilotes éoliennes flottantes sont actuellement en cours de développement afin d’atteindre l’objectif annuel de production d’un GW pour l’éolien marin.  

Au-delà des mesures adoptées suite aux décisions de 2017 et 2018, le CIMER annonce dans son dossier de presse celles prises en 2019. Ces mesures se décomposent selon des axes pratiquement similaires aux deux années précédentes, au premier rang desquelles la protection du milieu marin. 

L’objectif premier de 2019 est celui d’atteindre « zéro déchet plastique en mer en 2025 ». Cette pollution impactant espèces et activités humaines sera traitée à travers une feuille de route structurée en trois volets : « la prévention des pollutions plastiques en amont en renforçant la réglementation et la responsabilité des acteurs », « des actions de lutte contre les déchets plastiques sur les voies de transferts, le littoral et en mer », « la sensibilisation, l’information et l’éducation ». Par ailleurs, la France ambitionne de protéger 100% des récifs coralliens d’ici 2025 à travers un plan d’actions ciblant les outre-mer. Un objectif intermédiaire a été fixé à 75% pour 2021. Le CIMER annonce d’autres mesures ciblant la biodiversité et spécifiquement les populations de cétacés : le renforcement des moyens financiers alloués à l’Observatoire Pelagis et l’augmentation des contrôles et la fixation d’un niveau national de distance minimale d’approche des cétacés de 100 mètres dans les aires marines protégées. En outre, la règlementation des mouillages serait sur le point d’évoluer afin de protéger les fonds marins et des zones de mouillage écologique. Dans une approche différente, ciblant les entreprises, le CIMER annonce également l’adoption du référentiel de suivi sur les entreprises pour l’Objectif de développement durable 14. Développé par la Fondation de la mer et le Boston Consulting Group il est le premier référentiel de ce type. Enfin, le CIMER cible la réduction du rythme d’artificialisation des espaces littoral, de l’estran et des fonds marins dans les eaux sous juridiction française dans la continuité du Plan Biodiversité de 2018. 

            Des mesures écologiques parsèment également l’axe intitulé « bâtir l’économie maritime et portuaire du XXIèmesiècle ». Dans le cadre de la stratégie nationale portuaire 2020/2025, la France souhaite notamment faire de ses ports des hubs de la transition écologique. Cela pourrait se faire au moyen de leviers attirant les entreprises de la transition écologique sur les zones portuaires, la création d’un écolabel flux logistiques ou la définition d’une trajectoire de transition écologique dans chaque grand port maritime. Le CIMER cible aussi la réduction de la pollution atmosphérique liée aux navires à travers deux angles d’approche : le verdissement des navires et le développement des services de fourniture d’énergie alternative dans les ports. Dans la continuité des annonces de 2017 et 2018, il s’agira également d’assurer le suivi des parcs éoliens en mer par façade maritime. Cette dernière devient la nouvelle échelle de référence de ce suivi. 

Enfin, le CIMER confirme l’adoption du programme structurant pour la recherche sur l’océan. Ce programme intitulé « Un océan de solutions » et conçu conjointement par le CNRS et l’Ifremer cible trois thématiques : l’océan numérique, l’exploitation durable des océans, l’exposome océanique. Il s’appuiera sur un programme prioritaire de recherche (PPR) annoncé par le Président de la République Emmanuel Macron lors des Assises de l’économie de la mer 2019 et se concentrera sur trois territoires : les territoires d’outre-mer, l’océan profond et les océans polaires. La Plateforme Océan et Climat se réjouit du lancement d’un tel programme ambitieux à l’échelle nationale pour lequel elle a été consultée durant la phase d’élaboration afin de faire remonter son positionnement ainsi que les avis de ses membres représentant la société civile.