Face au recul de plus en plus rapide du trait de côte, la concertation est cruciale pour appliquer des solutions adaptées et appréhender les inévitables relocalisations.

Le littoral est un espace naturellement mobile, mais l’élévation du niveau de la mer due au changement climatique renforce les processus d’érosion et de submersion, touchant les activités économiques et les habitations. Entre 20 et 25 % des côtes métropolitaines sont concernées, dont 270 kilomètres subissent une vitesse de recul de plus de 50 centimètres par an. Par exemple, la côte rocheuse basque recule de 25 centimètres par an et la côte sableuse du cap Ferret perd 2 mètres par an. Cette montée des eaux accroît le risque de submersion, or 700 000 hectares sont situés sous le niveau pouvant être atteint par la mer lorsqu’elle flirte avec des hauteurs extrêmes, menaçant 1,4 million de résidents. Elle conduit en outre à la salinisation des terres et des réserves d’eau douce.

La majorité des solutions mises en oeuvre pour maintenir le trait de côte sont des digues, des épis, des brise-lames… Des solutions de paille face à la puissance océanique. D’autres solutions émergent, pérennes et fondées sur la nature : la renaturation, la végétalisation des dunes et falaises, la plantation de mangroves et la restauration corallienne en outre-mer.

La loi littoral n’est pas pensée à l’aune du changement climatique « Nous prônons ces solutions fondées sur la nature, mais elles prennent du temps à implémenter et ne protègent pas à 100 %, tempère Théophile Bongarts-Lebbe, de la Plateforme Océan & Climat. Il faut trouver une complémentarité des solutions. Penser l’adaptation dans le temps, c’est important, mais pour se protéger de la tempête qui arrive demain, il faut mettre une digue. » Pas de technique miracle, donc.

Quant aux solutions de retrait qui visent à relocaliser les personnes et les biens en des lieux plus sûrs, elles rencontrent parfois une forte opposition de la part des populations. Un empilement de textes, de lois et d’outils maîtrise l’articialisation des terres dans les zones exposées et accompagne l’évolution des territoires, mais il n’y a pas de politique fixée pour la relocalisation. Et « la loi littoral n’est pas pensée à l’aune du changement climatique. Par exemple, s’il faut relocaliser, elle impose de rester dans la continuité du bâti, mais s‘il y a une zone inondable juste en arrière, on est face à une discontinuité du bâti : s’adapter demande davantage de souplesse juridique, estime Théophile Bongarts Lebbe. L’outil pour s’adapter à l’élévation du niveau de la mer et aux évènements extrêmes, c’est la concertation. »

D’où le lancement en ce début d’année de l’ambitieux projet Sea’ties, porté par la Plateforme Océan & Climat, qui vise, dans une perspective de développement durable, à faciliter l’élaboration et la mise en oeuvre de politiques publiques pour accélérer l’adaptation des villes côtières. L’initiative s’appuie sur des travaux interdisciplinaires éclairants et des retours d’expérience de différentes régions du monde. Le projet s’adresse aux élus, aux gestionnaires et à l’ensemble des acteurs désireux d’agir pour une adaptation durable. « La ville ne fonctionne pas sans son territoire, les deux faisant système, souligne le chef du projet Sea’ties. C’est donc à l’échelle du territoire que l’adaptation des villes doit être pensée. » A terme, le projet compte fédérer un réseau international de villes côtières.

 

Cet article est issu de l’Abécédaire des Institutions « Protection de l’océan : bénéfices pour les territoires » (Janvier – Février 2021)